Château Guiraud
“Less is more”
Cette petite phrase, empruntée à Mies Van der Rohe, résume le concept architectural de notre projet. Tout est là –ou presque– pour faire de ce site magique l’outil d’un travail optimisé, mais aussi pour affiner l’identité du lieu et lui conférer cette présence iconographique qu’il mérite tant. Mise en exergue de cet écrin naturel et des bâtiments qui représentent son histoire, son prestige, par la dissimulation sous terre des chais et caveaux, hangars, dépôts. Telle est l’idée-mère, tout en étalant au regard un jardin composé : le jardin de la biodiversité, où s’exprime la dynamique du vivant, en dialogue et en complémentarité directe à la “mono” culture de la vigne environnante. Le jardin constitue un élément essentiel qui « diminue l’investissement en aménagement et augmente l’investissement en connaissance ». Il offre au visiteur, dès son arrivée, cet aperçu enchanteur sur l’essence même du domaine, lui laisse entrevoir en quoi et pourquoi Guiraud est unique. Le jardin est pépinière de cette faune et flore écrivant l’équilibre avec la culture de la vigne. Il est aromatique, médicinal, d’agrément ; maille végétale se déployant gracieusement devant le château, douce transition entre vignoble et installations. Il reflète les préoccupations de l’homme, l’appropriation du fruit de la terre, la recherche d’un produit élaboré. Seuls deux volumes aux formes simples percent le jardin : la serre et le pavillon d’accueil. Repères visuels forts, ils sont les premiers témoins de la recomposition du lieu et guident l’hôte sur les premiers pas d’une visite intense. La serre, pépinière, jardin d’hiver, forme avec l’ancienne orangerie le portail d’entrée de Guiraud en arrivant par l’allée majestueuse des platanes. Elle est un lieu qui témoigne du savoir faire des hommes de Guiraud et de leur extraordinaire connaissance et respect de la nature. Le fait de greffer ici pieds de vigne, d’élever les plants qui porteront le raisin, contribuent à faire comprendre que ce domaine n’est pas une simple exploitation agricole, mais un lieu de réflexion et de coexistence équilibrée entre homme et nature. Le pavillon d’accueil et de dégustation, petite “folie” vue dans le sens des pavillons habitant les grands jardins paysagers d’Outre-manche, devient l’élément central de la visite de Guiraud. Point de départ du circuit, on y revient ensuite, et la visite prend alors une autre dimension : espace de présentation des vins, halte obligée, voici arrivé le moment privilégié de la dégustation, où s’exposent le prestige de la terre, le savoir et la patience de l’homme. Plongée dans l’excellence. Ainsi, l’hôte entame son parcours, « la marche en avant » : il est accueilli sur le chemin du raisin, littéralement, et va poursuivre, chronologiquement, la découverte du processus de vinification.
Le bâtiment des presses
Seule partie émergeante des activités de vinification, tel un trait d’union naturel entre les lieux de maturation et de transformation du raisin. L’espace entier du volume existant est préparé pour le déroulement des tâches liées à l’arrivée du raisin et le pressage.
Les chais enterrés
Discrétion, fraîcheur, sérénité pour les temps forts du processus de vinification. D’un côté, la fermentation et l’élevage ; magnificence par le pur alignement des barriques. Noblesse, respect. Le vin y naît, insouciant, y fait son temps. De l’autre, la chaîne de conditionnement, la manutention : embouteillage, étiquetage, activités parallèles. Un bloc de services assure la séparation physique des deux parties distinctes, surmonté d’une plateforme dégageant l’horizon sur les chais imposants. Respiration. Le mur se prolonge et ressort de terre, il guide l’hôte vers le pavillon de dégustation. Point d’orgue.
La cour de services
Dans le prolongement des chais, hors parcours, retirée. S’organisent, sur cette cour ouverte sur l’extérieur, les locaux réservés au personnel fixe et saisonnier ainsi que les fonctions connexes, non directement liées à la vinification, mais nécessaires à l’exploitation : ateliers, menuiserie, remises de matériel, station de lavage, etc. L’on pourrait dire, la partie visible d’une merveilleuse fourmilière…
Matériaux
Opposition des parties enfouies et émergeantes. Expression de la simplicité des lieux, économie d’un vocabulaire architectural. Les matériaux renvoient au site ; bétons texturés évoquent la composition graveleuse des sols, la terre battue des anciens chais, reflets de l’expression du terroir. Mailles métalliques tissées, de robe étincelante très suggestive, enveloppent la serre et le pavillon de dégustation, participent à l’appel visuel et à la redéfinition du lieu.
Eclairage
Pavillon de dégustation vitré : intérieur et extérieur se confondent, irradiation généreuse d’une lumière révélatrice, comme pour affirmer l’évidence, le vin est le fruit naturel d’un terroir et d’une passion. Par la faille de l’escalier, la lumière plonge vers les chais, éclairage rasant. Ou les inonde sagement d´une luminosité naturelle, au travers de lanterneaux dispersés, tels des couches de culture, dans le jardin composé. Des vitrages diffusants filtrent la lumière, permettent d´en adapter l´intensité ; contrôle du rayonnement. Un éclairage artificiel, discrètement encastré, achève la mise en valeur des chais. Regards croisés entre nature et labeur, vignoble et bâtiments : l’histoire de Guiraud vous est contée. Les concepts sont dévoilés, vient à présent le temps de la confrontation des idées. Car le projet d´architecture se nourrit du dialogue entretenu avec le maître d´ouvrage, comme le vin ne s´ouvre et ne se révèle avant tout qu´à l´être qui le savoure.